Liberté religieuse et entreprise
par France CASTRES SAINT-MARTIN - DRUMMOND∗
Comment le droit appréhende-t-il le fait religieux dans un système laïc ? Comment le droit français, par exemple, traite-t-il les convictions, les pratiques, ou encore les communautés ou mouvements religieux ? Mal sans doute, si l’on en juge par les réactions du corps social. Il n’est qu’à rappeler les immenses manifestations de 1984 contre le projet d’unification de l’Education nationale et celles de 1994 contre l’augmentation des aides de la collectivité publique à l’enseignement privé, l’affaire du foulard islamique, les commentaires suscités par les décisions de justice reconnaissant la scientologie comme une religion, les polémiques plus anecdotiques soulevées par la seule déclaration d’un préfet invoquant sa foi religieuse à l’appui de sa décision d’interdire la production du groupe de rapp NTM dans son département, ou encore, les réactions à l’annonce du redressement fiscal des témoins de Jéhovah ou du rejet de la demande d’adoption formée par deux de leurs adeptes… Après un demi-siècle d’accalmie, si l’on excepte la question de l’enseignement public qui n’a cessé d’agiter les esprits, la laïcité semble en crise et avec elle l’appréhension du fait religieux par le droit. Le traitement juridique du fait religieux est devenu source de désordre, à moins peut-être que ce ne soit le désordre religieux, de plus en plus marqué, qui soit source de désordre juridique… C’est que le fait lui-même a singulièrement évolué. « La France du début du siècle était la « France seule », nationaliste ou en tout cas patriote, [ … ], chrétienne et même catholique, avec de faibles minorités protestante et juive et une forte minorité de personnes sans religion, souvent rationalistes, positivistes, assez souvent anticléricales [ … ]. Etant enfin une France « blanche » : L’immigration existait mais elle était presque exclusivement européenne et d’ailleurs chrétienne elle aussi. En