Ligeia.edgard allan poe
[Elle se penche sur la citerne et écoute.]
Il n'y a pas de bruit. Je n'entends rien. Pourquoi ne crie-t-il pas, cet homme ? Ah ! si quelqu'un cherchait à me tuer, je crierais, je me débattrais, je ne vaudrais pas, souffrir... Frappe, frappe, Naaman. Frappe, je te dis... Non. Je n'entends rien... Il y a un silence affreux. Ah ! quelque chose est tombé par terre. J'ai entendu quelque chose tomber. C'était l'épée du bourreau. Il a peur, cet esclave ! Il a laissé tomber son épée. Il n'ose pas le tuer. C'est un lâche, cet esclave ! Il faut envoyer des soldats. [Elle m'as rejetée. Tu m'as dit des choses infâmes. Tu m'as traitée comme une courtise, comme une prostituée, moi, Salomé, fille d'Hérodias, Princesse de Judée ! Eh bien, Iokanaan, moi je vis encore, mais toi tu es mort et ta tête m'appartient. Je puis en faire ce que je veux. Je puis la jeter aux chiens et aux oiseaux de l'air. Ce que laisseront les chiens, les oiseaux, de l'air 1e mangeront... Ah ! Iokanaan, Iokanaan, tu as été le seul homme que j'ai aimé. Tous les autres hommes m'inspirent du dégoût. Mais, toi, tu étais beau. Ton corps était une colonne d'ivoire sur un socle d'argent. C'était un jardin plein de colombes et de de lis d'argent. C'était une tour d'argent ornée de boucliers d'ivoire. Il n'y avait rien au monde d'aussi blanc que ton corps. Il n'y avait rien au monde d'aussi noir que tes cheveux. Dans le monde tout entier il n'y avait rien d'aussi rouge, que ta bouche. Ta voix était un encensoir qui répandait d'étranges parfums, et quand je te regardais j'entendais une musique étrange ! Ah ! pourquoi ne m'as-tu pas regardée, Iokanaan ? Derrière tes mains et tes blasphèmes tu as caché ton visage. Tu as mis sur tes yeux le bandeau de celui qui veut voir son Dieu. Eh bien, tu l'as vu, ton Dieu, Iokanaan, mais mai, moi... tu ne m'as jamais vue. Si tu m'avais vue, tu m'aurais aimée. Moi, je t'ai vu, Iokanaan, et je t'ai aimé. Oh ! comme je t'ai aimé: Je t'aime encore, Iokanaan. Je n'aime que