lorenzaccio

446 mots 2 pages
LORENZO. Tu me demandes pourquoi je tue Alexandre ? Veux-tu donc que je m’empoisonne, ou que je saute dans l’Arno ? veux-tu donc que je sois un spectre, et qu’en frappant sur ce squelette… (ilfrappe sa poitrine), il n’en sorte aucun son ? Si je suis l’ombre de moi-même, veux-tu donc que je m’arrache le seul fil qui rattache aujourd’hui mon cœur à quelques fibres de mon cœur d’autrefois ? Songes-tu que ce meurtre, c’est tout ce qui me reste de ma vertu ? Songes-tu que je glisse depuis deux ans sur un mur taillé à pic, et que ce meurtre est le seul brin d’herbe où j’aie pu cramponner mes ongles ? Crois-tu donc que je n’aie plus d’orgueil, parce que je n’ai plus de honte, et veux-tu que je laisse mourir en silence l’énigme de ma vie ? Oui, cela est certain, si je pouvais revenir à la vertu, si mon apprentissage du vice pouvait s’évanouir, j’épargnerais peut-être ce conducteur de bœufs. Mais j’aime le vin, le jeu et les filles, comprends-tu cela ? Si tu honores en moi quelque chose, toi qui me parles, c’est mon meurtre que tu honores, peut-être justement parce que tu ne le ferais pas. Voilà assez longtemps, vois-tu, que les républicains me couvrent de boue et d’infamie ; voilà assez longtemps que les oreilles me tintent, et que l’exécration des hommes empoisonne le pain que je mâche. J’en ai assez de me voir conspué[1] par des lâches sans nom qui m’accablent d’injures pour se dispenser de m’assommer, comme ils le devraient. J’en ai assez d’entendre brailler en plein vent le bavardage humain ; il faut que le monde sache un peu qui je suis et qui il est. Dieu merci, c’est peut-être demain que je tue Alexandre ; dans deux jours j’aurai fini. Ceux qui tournent autour de moi avec des yeux louches, comme autour d’une curiosité monstrueuse apportée d’Amérique, pourront satisfaire leur gosier et vider leur sac à paroles. Que les hommes me comprennent ou non, qu ils agissent ou n’agissent pas, j’aurai dit aussi ce que j’ai à dire ; je leur ferai tailler leurs plumes si je ne

en relation

  • Loltacru
    592 mots | 3 pages
  • Dérive urbaine
    736 mots | 3 pages
  • Critique livre sophie Kinsella
    428 mots | 2 pages
  • "Une lueur verte", invention
    1700 mots | 7 pages
  • Impala blues
    359 mots | 2 pages
  • lolote
    364 mots | 2 pages
  • Lollconar
    335 mots | 2 pages
  • Histoire étrange
    332 mots | 2 pages
  • Loutres
    541 mots | 3 pages
  • locandiera
    335 mots | 2 pages
  • loreal
    2215 mots | 9 pages
  • Loloferrarie
    262 mots | 2 pages
  • Ouhhhhhhhhh
    444 mots | 2 pages
  • Enseignante
    960 mots | 4 pages
  • Lololastreet
    1212 mots | 5 pages