Mademoiselle pârvati
A la mémoire de Mircea Eliade
Je connais un marbre antique, lumineux comme la glace. Ou l'opale. Seuls des sculpteurs de génie, Phidias sous Périclès, Michel-Ange à Florence, l'avaient employé pour insuffler la vie aux pierres irisées...
Une peau d’albâtre lustré, qui exhalait une douce odeur de thé. Une silhouette admirable, comme un nuage de phéromones veloutées, faisant plier chez l'homme désirs et opiniâtreté. Un visage grave et pur, des épaules sur lesquelles cascadait une soyeuse chevelure de cuivre aimanté. Des yeux profonds, spirituels ; un port superbe et princier.
Mademoiselle Pârvati - D. se faisait appeler ainsi ces derrières années - était une jeune femme d'une beauté fascinante, et tout aussi déterminée que sa grâce était éclatante. Aussi savait-elle sans l’ombre d’un doute que sa prochaine TS serait enfin la bonne.
D. avait pour habitude de raconter qu’adolescente elle avait fait deux Tentatives de Suicide "réussies". A ses auditeurs suffoqués, elle aimait expliquer en souriant qu’en effet, la première lui avait permis de ne pas redoubler sa Terminale : la Directrice de son lycée huppé avait à cœur d'éviter tout scandale pouvant nuire à l'image de son Etablissement.
La Tentative Suivante l'avait sauvée de la relation où, avec son fiancé de l'époque, ils s'étaient peu à peu englués, sournoisement happés dans les sables mouvants d'un amour pernicieux.
Felipe, son compagnon, voulait la "ramener sur terre" coûte que coûte, tandis que D. s'évertuait à le protéger de ses emportements de verrat immature et niais. Ainsi, ils passaient leur temps l'un à côté de l'autre, comme deux droites parallèles dans un espace euclidien, évoluant sur des planètes plus éloignées que Mars d'où, dit-on, viennent les hommes et, respectivement, Venus...
Felipe n'était pas un homme sans qualités, mais consacrait son énergie aux mille-et-une meilleures façons d'obtenir les faveurs sexuelles de son amie. Laquelle n'était point avide