magnus de silvye germain
« Les abeilles parlent dans ma bouche, elles dansent sur ma langue, elles chantent dans ma gorge, elles flamboient dans mon cœur. Elles sont ma joie, ma lumière, mon amour. »
(dit Blaise-le-laid dans) Sylvie Germain, Jours de colère, Gallimard, 1989, « folio » p.105.
Magnus, de Sylvie Germain (éditions Albin Michel, 2005 ; « folio » Gallimard pour cet essai) n’est pas seulement le roman d’une remarquable « quête d’identité » (et il n’est pas dit que cette lecture soit inutile en notre temps, si l’on souhaite toutefois ne pas voir simplifier des notions fondamentales, à des fins idéologiques obscures) mais aussi, et d’abord, le roman complexe de la quête d’un Nom, qui n’est pas à entendre, d’ailleurs, au sens de l’état-civil. Ce roman s’intègre dans une œuvre qui s’écrit autour de ce que l’on pourrait appeler un « roman généalogique », rendu nécessaire en une époque où le roman comme forme a pu apparaître problématique (et le roman généalogique est donc une généalogie du roman), mais également par la configuration de l’Histoire elle-même, celle héritée du XXème siècle, qui nous oblige non pas seulement à compter les morts, mais à nous situer dans l’ordre de la mémoire, ce que la science historique ne peut faire seule, si elle oublie le pouvoir de l’imaginaire, comme le regard singulier du romancier.
Le but que j’assigne au présent essai n’est pas de lever définitivement le voile sur cette complexité du « roman généalogique », mais d’essayer d’élucider, en résonance avec le thème de la revue dans lequel il s’insère, la place singulière qu’y tiennent des « abeilles » qui, à mes yeux de lecteur, ne sont pas sans importance. En effet, le roman de Sylvie Germain dont il est ici question, Magnus peut être lu comme s’organisant intimement (et poétiquement ?) autour de deux « chants » : le chant des insectes et le chant des abeilles. Pour éclairer cela, un détour est nécessaire pour refaire