Medecine
Christine dans son monologue
Extrait de la pièce Des Illusions Désillusions (2007, cette pièce a été jouée plus de quarante fois), ce monologue m’a paru intéressant à publier séparément. Je dois ajouter que Christine, l’actrice chargée de le porter, victime elle-même de violences de ce genre, m’a été très utile pour mettre en mots ce qu’elle me suggérait à travers son témoignage.
( Elle semble ouvrir une porte, entre lentement et tâte les murs, le sol, fait le tour d’une pièce fictive, caresse des mains, des bras, de tout le corps, les lieux qui sont censés représenter une chambre où elle a vécu autrefois. Elle colle sa joue sur le sol, comme si elle voulait entendre des pas, embrasse le sol, tout le corps allongé.
Elle s’installe ensuite en tailleur très lentement et commence à parler. Vers la fin, tout en parlant, elle s’éloigne de la scène et semble sortir par une porte.)
Je n’ai plus de mots.
Je n’ai que mes mains, mes pas, ma joue, mon corps pour me rappeler, puisque les enfants s’en sont allés et que l’Autre est parti là-bas en hurlant, comme toujours, pour toujours.
C’était il y a si longtemps.
Je me bouche les oreilles tant ce silence fait de bruit. La chaux blanche des murs c’est toutes les couleurs assemblées… le silence, ici, c’est tous les bruits ramassés, tassés, les voix chères qui se sont tues et celles de l’horreur qui ne cessent de résonner, elles me sonnent, ne cessent de m’humilier en ces lieux où le bonheur pourtant s’éleva parfois, c’est vrai, mais si bref, le bonheur… si bref, si peu, si peu.
Je n’ai plus de mots mais je me souviens des bras du bonheur, une ombre fugitive dans les nuits chaudes, puis les rires des enfants, leurs échos innocents, ignorant ce qui se passait entre lui… entre lui… et moi… Non, non, les enfants savaient, bien sûr, ils savaient… ils savaient… je le voyais à leurs paupières lourdes lorsqu’ils me souriaient, à cette façon souple qu’ils