Meditation sur l'homme
Or La Condition humaine met en exergue la solitude inéluctable de cette fin. Seuls face à la mort, les hommes sont également isolés de leur vivant, dans la mesure où l'action commune ne masque pas les divergences de motivation. Kyo Gisors est révolutionnaire par idéal, tandis que Tchen l'est par désespoir : « Que faire d'une âme, s'il n'y a ni Dieu ni Christ ? »
Malraux définit ses personnages comme des « types de héros en qui s'unissent la culture, la lucidité et l'aptitude à l'action ». Mais ne sont-ils pas également plongés en permanence dans la boue de la condition humaine, alternance de grandeur et de servitude ? Kyo se suicide dans l'espoir d'une fusion fraternelle : « ... il mourait parmi ceux avec qui il aurait voulu vivre, il mourait, comme chacun de ces hommes couchés, pour avoir donné un sens à sa vie », mais cet espoir est illusoire. Tout le tragique de la condition humaine est là : vivre c'est apprendre à mourir. L'angoisse eschatologique se double, dans l'impossible dépassement de soi, de l'appréhension face à sa propre conscience. La vie est absurde, et l'homme incapable de savoir qui il est.
Pourtant, dans ce drame existentiel, l'espoir persiste. Si l'homme ne saurait dépasser son destin, échapper à sa condition, il peut, en revanche, faire de sa mort une apothéose de la fraternité. Celle-ci repousse le néant de la vie humaine en