Moralité et immoralité dans les désarrois de l’élève törless de robert musil
Nous verrons en quoi Les désarrois de l’élève Törless, roman marqué par l’écriture incisive et caustique de Robert Musil, se joue des codes de la morale en décrivant une histoire violente et trouble, mais qui semble finalement anecdotique pour le protagoniste comme pour son auteur. Ce qui paraît le plus important, c’est la façon dont se construit ce récit et les symboliques qu’il génère, même si la conclusion à en tirer est peut-être que justement rien n’est jamais vraiment définitif ni évident dans cette oeuvre. En effet, les notions de justice et d’injustice, de pouvoir et de soumission, d’expérimentation et de perversion, sont tour à tour traitées dans cette œuvre, mais non pas de manière frontale et dans une visée éducative et moraliste, mais du point de vue du jeune protagoniste, Törless, habité par l’instabilité des émotions caractéristique des jeunes gens de son âge, mais aussi par une réflexion aiguë, solitaire, troublante, fluctuante puisque l’adolescent est sans cesse en quête d’un savoir nouveau et supérieur.
Avant de pouvoir s’interroger sur ce qui relève de la moralité ou de l’immoralité dans ce roman, il est nécessaire de le résumer succinctement afin d’en faire émerger les thèmes et les enjeux principaux.
Törless est un jeune adolescent scolarisé pour la première fois à l’école W., une école réputée dans l’aristocratie internationale, située dans une campagne morne et reculée de Russie. Comme tout adolescent qui quitte subitement ses parents, il est d’abord triste et se sent extrêmement isolé. Puis, il rencontre un jeune prince très croyant à l’allure féminine avec qui il se dispute peu de temps après au sujet de la religion, ce qui fait que tout ne redevient plus pour lui « qu’ennui et vide » (p.16). C’est alors qu’il va se lier, un peu malgré lui, à deux autres jeunes garçons un peu plus âgés que lui, Reiting et Beineberg, le texte disant explicitement : «