Nouvelle
Julie 2°4
L'Aube grise
Elle marchait le long de la chaussée lorsqu'elle la vit. Un tourbillon se déclencha alors dans sa poitrine. Son coeur se serra violemment et un sentiment nauséeux commença à l'envahir tandis qu'elle ravalait péniblement ses larmes. Elle couru sous la pluie pour se réfugier dans le bar le plus proche. Voilà ce qu'elle allait faire, noyer son chagrin dans l'alcool pour oublier ne serait-ce qu'un instant. Mais un instant précieux, un soulagement.
-« Un martini s'il vous plait. »
L'homme au comptoir le lui servit, et regarda un instant cette jeune femme dont les traits lui firent penser à une fleur fanée. Elle avait une manière gracieuse de porter son verre à ses lèvres et c'est ainsi qu'il remarqua la bague qu'elle portait à son annulaire gauche.
Elle était en argent- un noble matériau pensa-t-il- quelque peu éraflé, datant sans doute. Tout s'abîme avec le temps, la vie aussi. Mais le temps n'est pas le seul qui puisse abîmer la vie. La structure de la bague, son squelette, soutenait une belle émeraude d'un vert intense, rappelant l'éclat de son regard. Ses nombreuses facettes qui brillaient sous l'éclairage des néons et renvoyaient des éclats de lumière sur le bois vernis du bar. Le travail de l'orfèvre était d'une rare finesse, l'anneau d'argent retenait délicatement la pierre précieuse comme les pétales fragiles d'une rose retiennent la rosée du matin. Cette bague était le seul bijou qu'elle portait. Elle symbolisait beaucoup pour elle, sa grand-mère la lui avait offerte peu de temps avant de s'éteindre. Parfois, lorsque ses pensées se tournaient vers le passé, que les larmes survenaient, elle se souvenait de son visage serein et cela l'apaisait quelque peu. Mais à trop vivre dans ses souvenirs, elle en oubliait le présent et la claque de la réalité se faisait toujours aussi brutale à chaque réveil.
La chaleur de l'alcool envahit son corps et elle jeta un regard