Novecento : pianiste
Thésée
Thésée, je m’appelle Thésée, car, quand je passe, les gens se taisent, comme si j’étais la mort ou la beauté.
Quand je veux j’épouvante et quand je veux je charme.
On me donne le compliment comme une insulte, et lorsqu’on m’insulte je complimente, oui, je complimente l’audace de l’imprudent, puis sans qu’il le sache je détruit sa vie par petit coup de pinceaux je repeint sa toile, alors il vaut ne rien me dire.
Comme à la guerre, le dominant se laisse dominer, pour mieux dominer celui qui croit être le dominant, il se laisse tomber pour, comme le premier domino, se rabattre sur les autres.
Et je regarde, toujours au dessus, malgré ma petite taille, moi, toujours au dessus.
Comme au bas d’un gratte-ciel, on regarde toujours le belvédère, le belvédère lui, surveille si le gratte-ciel est bien ancré au sol.
Un dieu n’a jamais la tête dans les nuages, comme le rêve lui ait commun, il regarde le commun qui lui paraît médiocre.
Pendant que les communs admire le haut de cette tour dominant les nuages,
Et la tour se demande combien de temps son poids pèsera au sol ?
Combien de temps la masse regardera le maître comme un idéal, avant que la masse s’apercoit que l’idéal ne tient qu’à la force de leurs yeux ?
Que leurs regards qui maintiennent cette tour bien droite comme une armature, attire le jugement des autres qui eux-mêmes regardent en l’air sans savoir que le haut tient grâce au bas,
Et que sans le bas il n’y aurait pas de haut, que sans le haut le bas ne serait pas
Je ne sais pas… Il y a des fois où j’aimerais être en bas, du bas, on peut voir de haut en bas et bas en haut, mais jamais du haut on peut se voir d’en bas.
D’en bas, je suis haut mais dans haut je ne suis que moi.
Le regard des autres m’indiffère puisqu’il n’y a que mon regard qui compte, mais je ne me vois pas, je ne m’entend pas, ou peut-être plus.
Je suis une statue de la liberté, je rend libre seulement quand je suis vu,
Qu’importe d’être de