Oral du BAC-Article "Guerre"
Texte :
Le merveilleux de cette entreprise infernale, c’est que chaque chef des meurtriers fait bénir ses drapeaux et invoque Dieu solennellement avant d’aller exterminer son prochain. Si un chef n’a eu que le bonheur de faire égorger deux ou trois mille hommes, il n’en remercie point Dieu; mais lorsqu’il y en a eu environ dix mille d’exterminés par le feu et par le fer, et que, pour comble de grâce, quelque ville a été détruite de fond en comble, alors on chante à quatre parties une chanson assez longue, composée dans la langue inconnue à tous ceux qui ont combattu, et de plus toute farcie de barbarismes. La même chanson sert pour les mariages et pour les naissances, ainsi que pour les meurtres : ce qui n’est pas pardonnable, surtout dans la nation la plus renommée pour les chansons nouvelles. La religion naturelle a nulle fois empêché des citoyens de commettre des crimes. Une âme bien née n’en a pas la volonté, une âme tendra s’en effraye; elle se représente un Dieu juste et vengeur. Mais la religion articielle encourage à toutes les cruautés qu’on exerce de compagnie, conjurations, séditions, brigandages, embuscades, surprises de villes, pillages, meurtres. Chacun marche gaiement au crime sous la bannière de son saint. On paye partout un certain nombre de harangueurs pour célébrer ces journées meurtrières, les uns sont vêtus d’un long justaucorps noir, chargé d’un manteau écourté; les autres ont une chemise par-dessus une robe; quelques-uns portent deux pendants d’étoffe bigarrée par-dessus leur chemise. Tous parlent longtemps; ils citent ce qui s’est fait jadis en Palestine, à propos d’un combat en Véléravie. Le reste de l’année, ces gens-là déclament contre les vices. Ils prouvent en trois points et par antithèses que les dames qui étendent légèrement un peu de carmin sur leurs joues fraîches seront l’objet éternel des vengeances éternelles de l’Éternel; que Polyeucte et Athalie sont les ouvrages du