Paragraphe de commentaire art "traite des nègres" (1766) chevalier de jaucourt
Aucun homme n’a droit de les acheter ou de s’en rendre le maître ; les hommes et leur liberté ne sont point un objet de commerce ; ils ne peuvent être ni vendus, ni achetés, ni payés à aucun prix. Il faut conclure de là qu’un homme dont l’esclave prend la fuite, ne doit s’en prendre qu’à lui-même, puisqu’il avait acquis à prix d’argent une marchandise illicite, et dont l’acquisition lui était interdite par toutes les lois de l’humanité et de l’équité.
Il n’y a donc pas un seul de ces infortunés que l’on prétend n’être que des esclaves, qui n’ait droit d’être déclaré libre, puisqu’il n’a jamais perdu la liberté ; qu’il ne pouvait pas la perdre ; et que son prince, son père, et qui que ce soit dans le monde n’avait le pouvoir d’en disposer ; par conséquent la vente qui en a été faite est nulle en elle-même : ce nègre ne se dépouille, et ne peut pas même se dépouiller jamais de son droit naturel ; il le porte partout avec lui, et il peut exiger partout qu’on l’en laisse jouir. C’est donc une inhumanité manifeste de la part des juges de pays libres où il est transporté, de ne pas l’affranchir à l’instant en le déclarant libre, puisque c’est leur semblable, ayant une âme comme