Parlez-en à mon répondeur
Pour garder le contact en permanence... ou pour se mettre aux abonnés absents
Baromètre de sociabilité — plus on a de messages, plus on a d’amis — confident par intérim, révélateur de nos humeurs, le répondeur s’est installé dans nos vies sans faire de bruit, aussi discrètement que le radioréveil ou la machine à café. Un ménage sur trois en est aujourd’hui équipé, contre seulement un sur cinq en 1995, selon l’Insee. Et l’on reçoit en moyenne deux appels par jour via la petite boîte enregistreuse. A la différence d’innovations plus récentes — téléphone portable et Internet — le répondeur a bénéficié de peu d’études ou de discours promotionnels. Attentif à nos silences, réceptif à nos angoisses, il capte pourtant nos vies sur bande magnétique. On se raconte, on s’épanche. Il enregistré tout. Et recueille parfois la confidence qu’une communication en direct aurait tuée.
“C’est un objet comme on les aime: pratique et pas cher, il a su s’intégrer en douceur dans nos habitudes sans susciter de discours futuristes ni d’attentes démesurées. On lui fait confiance”, explique le chercheur Pierre-Alain Mercier, dans une étude consacrée aux usages sociaux du répondeur. Apparu au début des années 80, le répondeur-enregistreur à domicile a d’abord séduit les jeunes célibataires urbains branchés*, les artisans, pour des raisons professionnelles évidentes, avant de s’attaquer au marché des familles. La clef de sa réussite tranquille ? Une baisse des prix spectaculaire : de 1984 à 1996, ils ont été pratiquement divisés par 20. Aujourd’hui le coût moyen d’un répondeur s’établit entre 200 et 400 francs. On ne l’achète pas pour l’exhiber comme un mobile, mais parce qu’il s’avère indispensable pour décrocher un entretien d’embauche ou obtenir l’appartement que l’on craint de manquer faute d’être là.
“La fonction première du répondeur est de pallier l’absence. Il fait office de supertéléphone pour