Pascal
La première moitié du XVIIème siècle est dominée par la mathématisation de la pensée et par la figure de Descartes ; qui affirme qu'à condition d'appliquer la bonne méthode, on peut démontrer n'importe quelle vérité. L'opinion de Pascal est plus nuancé : la persuasion ne dépend pas seulement de la vérité et de l'ordre de ce que l'on démontre, mais aussi de l'état d'esprit de celui que l'on veut persuader. Dans L'Art de persuader, un ouvrage inachevé trouvé dans ses papiers, Pascal écrit : « Personne n'ignore qu'il y a deux entrées par où les opinions sont reçues dans l'âme, qui sont ses deux principales puissances, l'entendement et la volonté. La plus naturelle est celle de l'entendement car on ne devrait jamais consentir qu'aux vérités démontrées ; mais la plus ordinaire, quoique contre la nature, est celle de la volonté ; car tout ce qu'il y a d'Hommes sont presque toujours emportés à croire non pas par la preuve mais par l'agrément. »
Pascal est un trop grand mathématicien pour exclure le raisonnement, comme on le voit dans le très complexe fragment 100. Mais de sa fréquentation des libertins, il a aussi appris que le raisonnement scientifique ne peut pas exister seul. Certaines lettres de son ami, le chevalier de Méré, témoignent que Pascal, d'abord incapable de se comporter dans un salon, apprit très vite à parler et à « sentir » comme dans le grand monde et qu'il se forma à la façon d'utiliser l'intuition dans les rapports humains. Il va toujours conserver en tête ce schéma de la persuasion : le plus efficace, quand on ne s'adresse pas à des savants, est d'utiliser ce qu'il appellera dans les Pensées « l'esprit de finesse » (frag. 466-467), qui permet de persuader sans démontrer mathématiquement, en rendant ce que l'on écrit attrayant pour le lecteur.
Surtout, Pascal veut inculquer des « vérités divines ». Or, concernant ces vérités, Dieu, « a voulu qu'elles entrent du cœur dans l'esprit et non pas de l'esprit dans