Pensée sans langage
Essai de contribution de la neuropsychologie à la discussion sur la vison du réel en physique par D. Laplane
Mon point de départ sera la phrase d’introduction de l’exposé fait ici même par M. Nicolescu1 sur les niveaux de réalité : “ Je parle en tant que physicien, certes mais un physicien qui essaye de réfléchir sur ce qu’il fait. Lorsque nous sommes dans le domaine de la réflexion, il est honnête de dire que nous sortons de notre domaine proprement dit, c’est-à-dire le domaine technique ”. Je voudrais vous montrer comment la réflexion sur le langage et sur la pensée sans langage peuvent éclairer cette phrase que le profane pourrait trouver énigmatique et qui n’est pas sans gêner les physiciens eux- mêmes. Pour rester dans les limites qui me sont assignées, je serai obligé d’aller assez vite et je ne pourrai pas toujours fournir en détail les justifications de ce que je serai amené à dire mais je les fournirai autant que de besoin dans la discussion. Pour commencer, précisons nos termes : j’appellerai pensée le traitement conscient de l’information, de toute information car les états affectifs font partie de la pensée et sont le résultat d'un certain mode de traitement de l'information. Je ne chercherai pas à définir la conscience, ce qui entraînerait une longue discussion. D’un autre côté, inclure les mécanismes inconscients de la pensée, de l’inconscient cognitif ou freudien, nous aurait conduit à enfoncer des portes ouvertes. J’appellerai langage l’utilisation de symboles articulés entre eux par des règles de syntaxe.
La pensée sans langage peut "performer" à un haut niveau.
En tant que neurologue, c’est l’observation des aphasiques qui m’a fourni mon point de départ : les aphasiques ont perdu, à des degrés divers, le langage aussi bien intérieur qu’extérieur. On ne doit pas confondre aphasie et mutisme. Or il est manifeste que les aphasiques pensent et il était admis des premiers auteurs