Peut-on rire de tout
Désormais comme le rire semble bien l'expression la plus heureuse de la liberté d'expression, n'est-on pas à une époque où l'on pourrait précisément rire de tout ?
Toutefois un autre fondement de la modernité vient mettre en doute cette conjecture : la raison. En effet, la raison fonde un monde sérieux dont il ne semble pas raisonnable de rire. Ainsi "peut-on rire de tout" peut s'entendre en termes de permission et de capacité : soit, il ne serait pas permis de rire de tout, parce que l'homme n'est pas capable de rire raisonnablement de tout ; soit il serait permis de rire de tout, parce que l'homme serait capable de rire proprement de tout.
Or, le respect moderne ou humaniste exigerait encore que ces caricatures soient injurieuses. Toutefois, l'on peut se demander si ces prétendues limites (juridiques ou non) du rire ne poursuivent pas la démarche même du rire, ne se moque-t-on pas du moqueur en appliquant la sentence : "rira bien qui rira le dernier" ? II. Deuxième partie : le point de vue de la liberté. Rabelais : "Le rire est le propre de l'homme". Cette formule semble inaugurer la modernité. Cela voudrait signifier que dès qu'il y a de l'humain, il y a possibilité du rire ; que le rire ne pourrait jamais être refusé à l'homme puisqu'il constitue son essence ; sinon il faut reconnaître que la formule est elle-même ironique. Ainsi, si l'on admet que l'on ne peut rire de tout sur le mode de la moquerie, il reste que l'on pourrait rire de tout sur le mode de l'humour. Selon les religions (abrahamiques tout au moins) on ne peut rire, faire de l'humour à propos des choses sacrées : de Dieu, de la mort et a fortiori du crime. Rire du sacré est