Pezut-on penser par soi-même ?
Introduction :
Imaginons un échiquier, et deux hommes, face à face, séparés par les soixante-quatre-cases noires et blanches. Dans chaque camp se trouve un individu, plongé dans sa réflexion, instant de pensée solitaire s'il en est. Cette image du penseur, isolé du monde, semble très ancrée dans notre culture. Songeons à Archimède, mort lors de l'assaut de Syracuse par le général romain Marcellus. Tandis que les assaillants entraient dans la ville, le savant était demeuré à fixer une figure géométrique qu'il avait tracée dans le sable... Il fut tué par un soldat "ignorant", nous raconte Tite-Live. Pourtant, en contrepoint de cette image de l'homme à la pensée indépendante de son environnement, l'étude des cas d'enfants sauvages semble indiquer que la solitude est un facteur limitant dans le développement de l'intelligence. Est-il alors juste de dire que l'homme peut penser par lui-même ? S'il est vrai que la vie lui offre de larges domaines où sa pensée semble s'exercer en solitaire, on peut cependant s'interroger : ne s'agit-il pas là d'une autonomie illusoire ?
Développement :
I). Une relative indépendance de la pensée humaine.
1). Avec une acceptation au sens large de "penser" :
Si l'on considère comme pensée toute "activité de l'esprit", on peut alors estimer que, dans une large mesure, l'homme pense seul. En effet la vie quotidienne apporte aux individus un certain nombre d'informations (sensorielles par exemple) traitées automatiquement par le cerveau. Ainsi le petit garçon qui pose la main sur un plat brûlant la retirera immédiatement, même si on ne lui a pas indiqué les dangers des brûlures. Certains mécanismes cérébraux apparaissent donc innés chez l'homme.
2). Existence d'une pensée consciente et autonome :
L'étymologie du mot réflexion (tourner [son esprit] vers soi-même) semble évoquer la possibilité d'une introspection. Mais, plus encore, l'existence même de ce mot apparaît comme une preuve de l'existence de la