Plainte charles cros
Deux autres preuves de cette attirance maléfique sont données plus loin, au vers 12 (« Je me tue à ») et au vers 14: « papillon brûlé ». Les efforts du poète sont vains. D'une part il constate avec amertume que loin de séduire celle qu'il aime, il risque de l'éloigner de lui parce qu'à force de lui répéter les mêmes paroles désenchantées il commet la pire des fautes, ennuyer la femme aimée, de l'autre il sait qu'il y perdra la vie. Dans les deux cas les vers sont à l'indicatif, temps du réel et de la certitude. Par l'emploi du futur « je mourrai », à la suite de trois quatrains dont le seul temps était le présent, il cherche à imposer à la femme aimée sa propre conviction: s'il reste dans la ville, il mourra. Cette certitude intime, ce pressentiment de son destin, le poète l'exprime aussi par les sonorités: par la combinaison des nasales (« ennuie », « souvent ») et d'une voyelle sombre ou (dans « vous », «VOUS», « Souvent ») avec une voyelle aiguë (« ennuie », « dire », « si ») pour suggérer la distillation insidieuse de l'ennui au vers 13 ; par les consonances lugubres, presque funèbres des r (dans « mourrai », « brûlé », « dure ») au vers 14. Limage du « papillon brûlé » renouvelle l'image banale du papillon qui se brûle les ailes à la lumière d'une lampe; beaucoup plus expressive, elle évoque la fragilité d'un être gracieux qui se heurte à l'incompréhension et à l'égoïsme. C'est ainsi que la hantise de la mort resurgit avec cette dernière occurrence d'un mot appartenant au champ lexical de la mort, après « je