Que reste t il du tiers monde
Le terme de Tiers Monde a été émis pour la première fois le 14 août 1952 dans un article de la revue L'Observateur politique intitulé « Trois Mondes, une planète ». Alfred Sauvy y traitait des pays sous-développés en tant qu'enjeu des grandes puissances, et y osait alors un parallèle avec le Tiers Etat de la Révolution française, « ignoré, exploité, méprisé », aspirant lui aussi à « être quelque chose ». La conférence de Bandung en 1955 consacre l’expression, lui donnant un contenu géopolitique : l’ensemble des Etats du Sud, pour la plupart tout juste sortis du joug colonial, ayant pour principal caractère commun un niveau de développement moindre, dû à l’absence de Révolution industrielle au cours du XIXe siècle. En revanche, l’ambition de Nehru, son initiateur, de faire du Tiers Monde un acteur international rassemblant les non-alignés de la Guerre Froide n’est consacrée qu’en 1961, lors de la conférence de Belgrade, dont le nombre d’Etats participants est inférieur mais où sont intégrés certains pays d’Amérique latine. Depuis le « Tiers Monde » a connu un véritable succès en tant qu’expression, en s’immisçant pleinement dans le vocabulaire commun et politique. Il s’agit d’un ensemble de pays dont la situation socio-économique est inférieure à celle des grandes puissances, de « l’ensemble des pays en voie de développement » comme le stipulent encore certaines définitions. Mais l’expression porte aussi l’idée d’une troisième voie dans les relations internationales de la Guerre Froide. Il paraît donc légitime aujourd’hui, plus d’un demi-siècle après la naissance du mot, vingt ans après la chute du bloc de l’Est, de remettre en question cette notion et de s’interroger sur son contenu actuel. On analysera successivement la pertinence du Tiers Monde au regard des deux principales définitions du terme : en tant qu’espace du sous-développement et en tant qu’ensemble géopolitique aspirant à une nouvelle place sur la