Question diable au corps
Tout début de roman est chargé de donner des indications spatio-temporelles et d'engager l'intrigue.
Radiguet donne à lire un véritable début de roman en indiquent rapidement les données essentielles pour situer l'action et les personnages. Il répond en cette première page aux questions habituelles de l'incipit romanesque. Le narrateur est désigné dès le premier mot : "je" comme personnage principal et le mot "homme" nous révèle qu'il s'agit d'un homme. La deuxième phrase informe sur l'époque, la guerre, en même temps que sur l'âge du personnage "douze ans" et le début du deuxième paragraphe indique le lieu, F... au bord de la Marne.
Pourtant l'histoire se fait attendre. Si le passé simple et l'imparfait figurent bien ici : "J'eus", " vinrent" , "devais, "habitions", "condamnaient", ces temps sont mêlés à des futurs proches, futurs et présents de vérité générale, temps parfois qualifiés de temps du discours. L'énonciation se révèle alors problématique. Cette incertitude qui naît : est-ce du récit ou discours ? se double d'un mystère sur le contenu de l'histoire. Le narrateur évoque une "période extraordinaire", des "troubles", il a vécu une "aventure", et enfin le terme de "sensualité" associé au titre ouvre un horizon d'attente qui est celui du roman d'amour. Parallèlement aux réponses naissent des interrogations concernant le contenu de l'intrigue, ce qui semble, somme toute classiquement, remplir le contrat de l'incipit, informer et inciter à