Rabelais
Georges Bertin.
« L’esprit humain est exposé aux plus surprenantes injonctions, sans cesse il a peur de lui-même » Georges Bataille, L’Erotisme, Minuit, 1957.
François Rabelais (1494?-1553).
Il y a quatre cent cinquante cinq ans cessait le rire de François Rabelais. Et « pour ce que rire est le propre de l’homme », il est intéressant, au moment où cette rencontre questionne le « partage des savoirs », de nous interroger ensemble sur une des figures qui pour être annexe à l’un de ses héros, sans doute moins traditionnellement connus que Gargantua, Pantagruel ou Panurge, mais dont le nom EPISTEMON signifie précisément « celui qui sait, qui est instruit, qui a de l’expérience ». Rabelais utilise là ce que l’on a appelé un procédé anthroponymique pour désigner un phénomène. Cette figure nous semble de fait révélatrice de la rupture qu’engendre tout rapport au savoir en même temps qu’elle interroge la scolastique dont notre époque est loin d’être libérée, y compris au cœur de la cité savante.
« Ainsi donc comme ilz cherchoient, ils le trouvèrent tout roide mort, et sa teste entre ses bras toute sanglante. Lors Eusthenes s'écria : «Ha ! male mort, nous as tu tollu le plus parfaict des hommes !» A laquelle voix se leva Pantagruel, au plus grand deuil qu'on vit jamais au monde. Et dist à Panurge : «Ha ! mon amy, l'auspice de vos deux verres et du fust de javeline estoit bien par trop fallace !» Mais Paiiurge dist : «Enfans, ne pleurez goutte, il est encores tout chault, je vous le gueriray aussi sain qu'il fut jamais». Ce disant print la teste, et la tint sur sa braguette chauldement, afin qu'elle ne print vent. Eusthenes et Carpalim portèrent le corps au lieu où ilz avoient banqueté, non par espoir que jamais guerist, mais afin que Pantagruel le vist. Toutesfois, Panurge les reconfortoit, disant : «Si je ne le guerys, je veulx perdre la teste (qui est le gaigé d'un fol)