rapport de brodeck
La confusion des êtres et la peur de l'autre
L'intervention de l'anderer permet à Claudel de traiter d'un thème qui lui est cher: l'obsession et la peur de l'autre, comme menace éventuelle à une vie trop tranquille.
L'anderer est un artiste: il représente une menace pour les habitants, surtout lorsqu'il leur présente les tableaux qu'il a peints d' eux.
« Les portraits qu'avait faits l'anderer des visages agissaient comme des révélateurs merveilleux qui amenaient à la lumière les vérités profondes des êtres. On aurait cru une galerie d'écorchés. »
Plus douteux encore, l'anderer écrit. Qui dit écriture, dit preuve, dit donc danger.
L'art est ici source de malheur. Ironiquement, Claudel dessine un village méfiant et susceptible, totalement fermé à toute sorte de nouveauté, et paranoïaque envers toute forme d'expression émanant de cette nouveauté.
Le village et le roman plus largement évoluent dans cet atmosphère sombre et lugubre. Les noms que donne Claudel aux habitants y participent : Brodeck, mais surtout Göbbler, Schloss, Jenkins, la mère Pitz, Diodème. Sont-ils des noms ou des prénoms ? Ces personnages interviennent dans le récit tels des fantômes, pour faire peur à Brodeck ou le presser de finir son rapport, afin qu'ils puissent se déculpabiliser et mourir tranquilles. Le but n'est pas ici de les imaginer ; aucun visage ne vient à notre esprit : le lecteur retiendra leur regard menaçant ou leur sourire moqueur et méprisant. Ils confirment l'ambiance mortelle qui flotte dans les rues et les chaumières fatiguées par les horreurs de la guerre.
Pourquoi lire le rapport de Brodeck
Au-delà du témoignage émouvant d'un homme convalescent, la narration est dotée d'une grande intelligence : elle donne une