Rapport
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Les raisons d’aimer…
Sarah Sepulchre
Fictions de guerres
Fictions de guerres
Sarah Sepulchre, Observatoire du récit médiatique, université catholique de Louvain (Belgique)
L
es fictions de guerre audiovisuelles sont au centre d’un débat sans cesse renouvelé. On s’interroge sur leur légitimité à raconter ce type d’événement. Si le questionnement vaut pour toutes les fictions 1, il est plus crucial encore pour les récits de guerre qui représentent ce que Sébastien Fevry nomme des traumatismes 2. Les fictions de guerre, surtout celles qui relatent des conflits réels, sont aussi sujettes à la question de l’idéologie qu’elles véhiculent. Ces fictions, américaines pour la plupart, sont d’emblée suspectées d’américano-centrisme dans le meilleur des cas, de propagande dans le pire. Le fait que les producteurs s’adressent à l’armée pour obtenir des conseils, des véhicules, voire des militaires comme figurants ne fait que renforcer la méfiance 3. Après un bilan quantitatif, nous allons voir ce qu’il en est pour la télévision à travers l’analyse des Têtes brûlées et de Frères d’armes.
La Seconde Guerre mondiale, le conflit majoritaire
La base de donnée The Internet Movie Database 4 recense 5 588 fictions de guerre 5 dont 195 sont des fictions sérielles télévisuelles. Elles proviennent de 27 pays différents, parmi lesquels seuls la République fédérale de Yougoslavie, la Russie, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis ont produit plus de 10 fictions. À eux seuls, les États-Unis produisent 32 % des séries de guerre mondiales. Précisons que parmi tous ces récits, seule une petite vingtaine est largement connue (par exemple China Beach, MASH, Tant qu’il y aura des hommes). Six conflits reviennent plus d’une fois : la guerre froide (2), la Première Guerre mondiale (2), la guerre de Corée (3), la guerre du Vietnam (6), la guerre civile américaine (8), la Seconde Guerre mondiale (66) 6. Près de 50 % des récits de guerre sont donc