Rimbaud - etude du "dormeur du val"
Il s’agit d’un des premiers poèmes de Rimbaud. : il a environ seize ans, lorsqu’il fugue pour la deuxième fois du domicile parental de Charleville, en pleine guerre franco-prussienne.
LE DORMEUR DU VAL
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
7 octobre 1870.
Ce poème fut écrit en 1870, année d’errance pour lui et année terrible pour les Français : cette année marque la fin de l’Empire de Napoléon 3et le début de la IIIème République.
Il recopie vingt-deux textes dans un cahier qu’il confie à son ami Paul Demeny, poète également.
L’année suivante, il demandera à son ami de le détruire avec les autres quand il refusera tout romantisme, toute subjectivité, tout culte de la forme.
Sa première publication date de1888 dans l'Anthologie des poètes français du XIXe siècle, tome IV.
La forme est classique du sonnet de la Renaissance, avec des vers en alexandrins.
Ce sonnet est inspiré par la guerre de 1870. Rimbaud dresse un tableau très coloré et vivant qui frappe l'imagination pour en faire ressortir toute l'horreur, sans jamais prononcer le mot "mort."
Dans la première strophe, le premier quatrain, nous avons affaire à un ruissellement de lumière (« haillons