saint julien l'hospitalier
Gustave Flaubert, Paris, Ferroud, 1895 ; repris dans Spicilège, Mercure de France, 1896.
Présentation
Hugues Laroche
Un peu moins de vingt ans après la publication de Trois contes, la préface de Marcel Schwob est l’une des premières études un peu fouillées sur La Légende de saint Julien l’Hospitalier, dans une perspective essentiellement comparatiste. La traditionnelle recherche des sources initiée dès la première section rejoint ensuite des préoccupations chères à Schwob touchant aux relations entre littérature savante et littérature populaire. La thèse défendue ici, non sans arrières pensées anticléricales, est en effet celle d’une origine populaire et païenne de la légende dont Schwob fait un « type archaïque » rapproché du mythe d’Œdipe.
Sa démonstration s’appuie sur une connaissance précise des acquis récents des recherches linguistiques, mythologiques et folkloriques dont J.-P. Saint-Gérand a montré le développement et la connexion au cours du XIXe siècle 1 . C’est une même obsession des origines qui entraîne philologues et narratologues dans une sorte de remontée sans fin débouchant, par delà la découverte du sanscrit et de la mythologie indienne, sur l’invention de l’indo-européen. Cette perspective régressive est doublée comme chez Schwob d’une déconstruction du mot ou du récit permettant l’analyse et la comparaison : alors que le mot est conçu comme la combinaison d’une racine et d’affixes, dont Schwob met brillamment en évidence la cohérence et la complexité dans ses études sur l’argot 2 , le récit lui-même, ou pour le moins le conte populaire, est défini comme une combinaison de thèmes épisodiques interchangeables et stéréotypés.
C’est ainsi que Schwob décompose la légende qui nous intéresse ici en un thème général, celui d’un homme accomplissant « par destinée un meurtre involontaire » et trois « thèmes épisodiques » inclus dans