Sciences et vérité
Que la science évolue dans un autre univers que celui des convictions et des opinions, c'est une assertion que n'ont cessé de marteler les philosophes, de Platon à Russell en passant par Berkeley, Kant et d'autres encore, qui ont fustigé la confusion entre savoir et croire. Bachelard, par exemple, tenait l'opinion pour le premier obstacle à surmonter : « L'esprit scientifique nous interdit d'avoir une opinion sur des questions que nous ne comprenons pas...5 ». Cet univers est traditionnellement celui du discours rationnel, qui apporte les arguments et produit les preuves de ce qu'il avance, comme aimait à le souligner Descartes : « [...] que ceux qui cherchent le droit chemin de la vérité ne doivent s'occuper d'aucun objet à propos duquel ils ne puissent obtenir une certitude égale aux démonstrations de l'arithmétique et de la géométrie6 ». L'étroitesse de cette liaison entre science et vérité est devenue pour nous évidente. C'est justement la raison de cette évidence qu'il faut peut-être questionner. Un premier ordre de réponses peut être proposé : la science et la vérité se trouveraient liées de manière quasi « consubstantielle ».
Dans ce premier sens, il ne peut y avoir de « fausse science », entendue comme science du faux ou de l'erreur. Une science qui se prend pour telle ou se prétend telle sans en être une est soit ignorance, soit tromperie, naïveté de l'esclave de Ménon, ou ruse et habileté à persuader de Gorgias.
Dans un deuxième sens, même si la science achoppe parfois sur des obstacles qui semblent insurmontables, même si elle stagne longtemps, voire se trompe, au final il ne