Scène 4 - arnolphe, agnes
Venez, ce n'est pas là que je vous logerai,
Et votre gîte ailleurs est par moi préparé.
Je prétends en lieu sûr mettre votre personne.
(Se faisant connaître.)
Me connaissez-vous?
AGNES, le reconnaissant.
Hai!
ARNOLPHE
Mon visage, friponne,
Dans cette occasion rend vos sens effrayés,
Et c'est à contre-coeur qu'ici vous me voyez;
Je trouble en ses projets l'amour qui vous possède.
(Agnès regarde si elle ne verra point Horace.)
N'appelez point des yeux le galant à votre aide:
Il est trop éloigné pour vous donner secours.
Ah! ah! si jeune encor, vous jouez de ces tours!
Votre simplicité, qui semble sans pareille,
Demande si l'on fait les enfants par l'oreille;
Et vous savez donner des rendez-vous la nuit,
Et pour suivre un galant vous évader sans bruit!
Tudieu! comme avec lui votre langue cajole!
Il faut qu'on vous ait mise à quelque bonne école!
Qui diantre tout d'un coup vous en a tant appris?
Vous ne craignez donc plus de trouver des esprits?
Et ce galant, la nuit, vous a donc enhardie?
Ah! coquine, en venir à cette perfidie!
Malgré tous mes bienfaits former un tel dessein!
Petit serpent que j'ai réchauffé dans mon sein
Et qui, dès qu'il le sent, par une humeur ingrate,
Cherche à faire du mal à celui qui le flatte.
AGNES
Pourquoi me criez-vous?
ARNOLPHE
J'ai grand tort en effet!
AGNES
Je n'entends point de mal dans tout ce que j'ai fait.
ARNOLPHE
Suivre un galant n'est pas une action infâme?
AGNES
C'est un homme qui dit qu'il me veut pour sa femme:
J'ai suivi vos leçons et vous m'avez prêché
Qu'il se faut marier pour ôter le péché!
ARNOLPHE
Oui. Mais pour femme, moi, je prétendais vous prendre:
Et je vous l'avais fait, me semble, assez entendre.
AGNES
Oui. Mais, à vous parler franchement entre nous,
Il est plus pour cela selon mon goût que vous.
Chez vous le mariage est fâcheux et pénible,
Et vos discours en font une image