Shakespeare
Première partie
LEONATO J’apprends dans cette lettre que Don Pedro d’Aragon arrive ce soir à Messine.
Le MESSAGER Il est tout près maintenant, il était à moins de trois lieues quand je l’ai quitté.
LEONATO Je lis que Don Pedro a conféré de grands honneurs à un jeune Florentin nommé Claudio.
Le MES. Sa conduite a surpassé les promesses de son âge, il a accompli, sous les dehors d’un agneau, les exploits d’un lion.
BEATRICE Dites-moi, je vous prie, le Signor Bravaccio est-il ou non rentré de ces guerres ?
LE MES. Je ne connais personne de ce nom-là, madame.
HERO Ma cousine parle du Signor Benedict de Padoue.
LE MES. Oh, il est rentré, et plus plaisant que jamais.
BEA Dites-moi, je vous prie, combien en- a t-il tués et mangés dans ces guerres ?
LEO Vraiment, ma nièce, vous chargez trop le Signor Benedict, mais il vous rendra la pareille, je n’en doute pas.
LE MES Il est bon soldat, madame.
BEA Bon soldat face à une dame ; mais qu’est-il face à un gentilhomme ?
LE MES Vrai gentilhomme face à un gentilhomme, homme face à un homme, farci de nobles qualités.
BEA En effet, ce n’est rien d’autre qu’une farce d’homme.
LEO Il y a une sorte de joyeuse guerre entre le Signor Benedict et elle.
BEA Qui est son compagnon à présent ? Tous les mois, il a un nouveau frère d’armes. Il en va de sa foi comme de son chapeau, il en change à chaque mode nouvelle.
LE MES Je vois, madame, que ce gentilhomme n’est pas dans vos papiers.
BEA Non, et s’il l’était, je mettrais le feu à mon bureau. Mais dites-moi je vous prie, qui est son compagnon ?
LE MES On le voit surtout en compagnie du très noble Claudio.
BEA O Seigneur, il va s’accrocher à lui comme une maladie ; il s’attrape plus vite que la peste, et la victime devient folle sur le champ. Dieu vienne en aide au noble Claudio ! s’il a attrapé le Bénédict, il lui en coûtera mille livres pour se guérir.
LE MES Je prendrai soin de rester ami