Société moderne
Ils disent d’une voix forte ou mezzo voce que la littérature sert à découvrir le monde, à le nommer, le décrire, le déployer, lui demander des comptes, l’enrichir, le compléter, le refaire avant de le transmettre. Oui, ils le disent même s’ils dénoncent ce monde, le vilipendent, même quand ils font mine de s’en écarter, de le quitter ou de s’en défaire. Mais la plus juste manière d’aborder la question de savoir à quoi sert la littérature, en fin de compte je la trouve dans l’ironie de Chesterton quand il murmure que si la littérature est un luxe, la fiction est une nécessité. Car la fiction est l’ombilic de la littérature. Découverte sans doute avant le feu, la fiction a dû naître dans la résille de nos neurones avec le geste et la parole, et longtemps, orale avant d’être écrite et bien plus tard imprimée, elle a servi, dès les commencements, à travestir l’ignorance de nos origines, à brider les peurs de l’inexplicable et à justifier les pouvoirs que les plus roublards et les plus rusés en tiraient. Et il nous en est resté quelque