Spinoza
Victor Brochard
Alain.Blachair@ac-nancy-metz.fr
Cliquez sur le lien ci-dessus pour signaler des erreurs. [371] Les historiens ne sont pas d’accord sur le sens et la portée qu’il convient d’attribuer à la doctrine de l’éternité des âmes exposée dans la seconde moitié de la cinquième partie de l’Éthique. Qu’il ne s’agisse pas de l’immortalité au sens vulgaire du mot, c’est ce qui est attesté expressément dans le texte même de la Proposition XXI, où la mémoire et l’imagination sont considérées comme liées à la vie présente. D’ailleurs il est indubitable que l’existence de l’âme dans son rapport à la durée cesse avec celle du corps. L’éternité de l’âme affirmée par Spinoza est attribuée uniquement à l’essence, et, dans toute cette dernière partie de l’Éthique, c’est uniquement de l’essence opposée à l’existence qu’il est question. Mais cette éternité de l’essence, comment faut-il l’entendre ? On peut être à première vue tenté de croire qu’il s’agit d’une éternité tout impersonnelle, plus ou moins analogue à celle qu’Aristote attribue à l’intellect actif qui vient éclairer quelque temps l’âme humaine sans cesser d’appartenir à la divinité, ou encore comme l’étincelle de feu divin qui, selon les Stoïciens, éclaire un instant l’âme humaine, et, à la mort du corps, se réunit au feu universel. On peut aussi être tenté de croire que cette essence éternelle, opposée à l’existence dans la durée, se réduit en fin de compte à une pure possibilité. Cependant un examen attentif montre qu’on [372] aurait tort de s’arrêter à ces deux interprétations. C’est ce que nous allons essayer de montrer rapidement avant de chercher quels rapports existent entre la théorie de Spinoza et celle des philosophes anciens qui ont affirmé avant lui la doctrine de l’immortalité ou de l’éternité des âmes.
Tout d’abord la composition même de l’ouvrage nous indique qu’il s’agit bien, dans la seconde moitié du cinquième livre, d’une éternité