Eléments d’introductions :
Au cœur de la problématique de Julien Sorel et de Stendhal lui-même, se trouve le conflit entre l’être et l’aspiration à un autre être idéalisé, entre la vérité de son être et l’apparence que l’on veut ou doit donner au sein de la société. D’ailleurs qui est le vrai Stendhal ? Henri Beyle ? Entre les différents pseudonymes et la vie d’Henry Brulard on devine bien ses difficultés à définir un « moi » unique au milieu de ses différentes personnalités. Ce qui fait l’unité du « moi » de Stendhal est certainement à chercher dans son rapport à la vérité et à la sincérité.
Depuis 1770 et avec Rousseau plus précisément est née une vague de sentimentalisme effrénée qui trente ans plus tard apparait pour Stendhal comme le conformisme en amour. Il s’oppose à cette standardisation stéréotypée des sentiments amoureux et cherche un peu d’authenticité dans ces passions largement romanesques. L’auteur ironise sur les faux sentiments, il veut en finir avec le niais et le faux. Ce ton ironique fait-il pour autant un roman comique de son livre ? L’auteur croit-il à ce qu’il défend ? Le roman est ambigu à ce sujet. Julien passe son temps à apprendre des choses auxquelles il ne croit pas (la Bible, les phrases d’amour de la Nouvelle Héloïse), on ne peut donc pas se fier à ce qui est dit par rapport à ce qui est pensé.
Les émotions contemporaines deviennent objet de méfiance pour l’être sensible. Elles doivent d’abord être éprouvées comme étant vraies. Julien est exposé au danger pour prouver sa sincérité. Sa valeur est d’abord mise en doute et soupçonner tout au long du roman. A la fin le héros ne monte pas dans l’échelle sociale comme il l’aurait souhaité mais il bénéficie d’une véritable reconnaissance morale, ses sentiments ont été éprouvés. Selon Diderot la part de facticité et la part de sensibilité peuvent coexister et former des mélanges instables. On peut se demander si ce n’est pas aussi la position de Stendhal. Il représente les «