Suite de texte
Boule de Suif, dans la hâte et l’effarement de son lever, n’avait plus rien à songer ; et elle regardait, exaspérée, suffoquant de rage, tous ses gens qui mangeaient placidement.
La colère l’envahit, elle sentait comme une vague d’air chaud, puis frais. Elle ne savait plus où se mettre. Les uns dévoraient leur repas, les autres jouaient. Que devait-elle faire ?
Boule de Suif ne savait plus rien tant elle était atteinte et contrariée. Comment devait-elle réagir ?
Ses yeux brillaient quand elle regardait les deux sœurs manger goulument. Et, avec une peur bleue de leur réaction, Boule de Suif se lança :
- A votre tour, vous ne manquez point de réserve. Un silence se fit entendre. Chaque personne, tour à tour, regardait Boule de Suif avec un air scandalisé. Certains se demandaient qu’allait être la réaction des deux bonnes sœurs, les femmes, elles, étaient offusquées. Elles se demandaient comment une femme aussi indignée osait se mettre en avant après l’épisode de la veille.
Boule de Suif, contente de son premier effet et rassurée, continua :
- Certes, votre repas ne sera pas à la hauteur de mes deux poulets ni de mes petits pains, mais ça fera l’affaire. Elle lança un regard à Mr Loiseau & ajouta, A la guerre comme à la guerre, mes amis.
Doucement, et sans aucune gêne, Boule de Suif arracha le saucisson des mains des bonnes sœurs, et avec un couteau qu’elle tenait dans sa poche, coupa de fines tranches, devant ces personnes nobles.
Les regards restaient interloqués. Boule de Suif, elle, mangeait paisiblement ses tranches, et reposa le saucisson sur les genoux d’une des sœurs.
Avec une voix sereine, elle ajouta :
- Mes sœurs, ce fut un plaisir pour moi de partager ce repas avec vous. De plus, je suis désolée d’avoir touché votre charcuterie avec mes mains, ses mains qui ont osé toucher un Prussien. Vous savez, pour vous libérez, vous tous et moi-même. Mais, si vous n’en voulez vraiment