Superstrat du français
COMMUNICATION D’ANDRÉ GOOSSE À LA SÉANCE MENSUELLE DU 10 SEPTEMBRE 1994
L
e français et les autres langues romanes viennent du latin, sont du latin que des influences particulières ont différencié selon les lieux, spécialement les influences exercées par d’autres langues, ce que les linguistes répartissent en trois catégories, qu’ils appellent substrat, superstrat et adstrat. L’adstrat, c’est ce qui est du au simple voisinage, comme les emprunts faits au néerlandais, plus précisément au flamand, par le français de Belgique. Le substrat et le superstrat touchent à des aspects plus intimes de la langue, car ils ont leur source dans une coexistence de deux langues, coexistence antérieure à l’implantation du latin — c’est le substrat — ou postérieure à cette implantation — c’est le superstrat. Le latin, introduit en Gaule par la conquête romaine, a évincé la langue locale, le gaulois. Celui-ci n’a disparu que peu à peu après une période de bilinguisme, situation éminemment favorable à une sorte de compénétration. On sait que les Gaulois ont conservé dans leur latin un certain nombre de mots de leur langue première, mots que l’on retrouve en français ou dans les dialectes actuels de l’ancienne Gaule (oïl et oc). Il est évident que les Gaulois ont aussi prononcé le latin à la gauloise et qu’ils ont dû garder dans leur latin des structures de ce qui a été leur langue maternelle. Malheureusement, notre connaissance limitée du gaulois ne permet guère de concrétiser cette évidence et donc de déterminer ce que le français doit au substrat gaulois, en dehors du lexique et de la toponymie, et même pour la totalité du lexique et de la toponymie. Mon sujet est le superstrat, c’est-à-dire, pour le français, l’influence germanique résultant des invasions, spécialement celle des Francs. Ce terme
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technique me semble nécessaire pour distinguer cela d’autres influences germaniques, les unes postérieures à l’époque mérovingienne — je