Supplément au voyage de bougainville
Denis Diderot
Denis Diderot (1713-1784) rédige en 1772 un dialogue intitulé Supplément au Voyage de Bougainville dans lequel il réagit à la publication en 1771 du Voyage autour du Monde du navigateur. Ce dernier avait mené une expédition scientifique qui l’avait conduit notamment à Tahiti, dont il avait ramené un habitant en Europe. Curieux de tout, aimant le savoir, Diderot est aussi un défenseur infatigable des droits de la personne humaine. Son ouvrage fait dialoguer deux interlocuteurs, A et B, B étant plus spécialement l’interprète de l’auteur. Dans la 2ème partie du dialogue intitulé « Les adieux du vieillard », il fait parler un vieux tahitien qui prédit d’abord un avenir funeste à ses compatriotes, puis reproche de façon vibrante aux européens des bouleversements qu’ils ont provoqué sur l’île. Nous verrons d’abord ce qui rend son discours vivant et persuasif, puis quel réquisitoire il dresse aux européens avant d’examiner en quoi et comment une forme d’utopie nous renvoie à l’esprit des Lumières.
I] Un discours vivant et persuasif
A)d’abord parce que la situation d’énonciation créée l’impression d’une communication directe.
On a un discours rapporté au style direct, avec des guillemets, les pronoms « toi », « nous », « vous ». On a également des modalités expressives ( !, ?) qui traduisent la passion qu’il met à parler, de ce qu’il ressent. Ca nous interpelle. Le « nous » peut permettre de nous identifier. Les temps sont majoritairement le présent et le passé composé qui renvoient à l’énonciation.
B)Puis parce que la variété des interlocuteurs sollicite constamment l’attention
Le vieillard s’adresse d’abord à Bougainville(« Chef des Brigands » ; « tu ») ensuite au français (« vous » l.21), après au « Ourou » et on repasse à Bougainville avec « tu » et enfin « vous » qui désigne ses compatriotes et français et de temps en temps « nous » qui représente les tahitiens. Le lecteur est attentif ce qui permet de