Supplément au voyage de bougainville
Analyse
Le texte proposé est un extrait du Supplément au Voyage de Bougainville de Denis Diderot. Publiée pour la première fois à titre posthume, en 1796, l’œuvre se présente comme une succession de dialogues enchâssés[1] au cours desquels A et B présentent leur lecture de documents inédits de Bougainville. A travers ces confrontations, Diderot abordent des questions de société litigieuses, comme c’est le cas dans l’extrait que nous commenterons, où Orou, un Tahitien, s’opposent à la conception du mariage occidental défendu par l’Aumônier. Au-delà d’une querelle de mœurs, l’auteur entraîne le lecteur, par un développement ludique et vivant, à s’interroger plus fondamentalement sur sa conception du bonheur, ainsi que sur la distinction entre nature et culture. Nous nous demanderons en quoi le recours au dialogue permet à Diderot d’exposer ses arguments avec vivacité et efficacité. Dans un premier, nous montrerons que le dialogue fonctionne selon une structure particulièrement dynamique, pour nous attacher dans un second temps à la présentation des personnages, dont les caractères influencent inévitablement le lecteur. En dernier lieu, nous reviendrons sur la réflexion que Diderot propose concernant la définition du bonheur, et ses conséquences selon qu’on le conçoit dans un monde civilisé ou un monde en accord avec la nature.
I. Le dialogue : une structure dynamique
a. Des rythmes variables qui rendent la lecture vivante
Différentes longueurs :
- stichomythie : échange bref et rapide entre l’aumônier et Orou en début de dialogue
- tirades : Orou développe sa pensée dans deux tirades très rhétoriques ( phrases longues, complexes qui amplifient le discours.
L’alternance de rapidité et de pause de développement peut contribuer à captiver le lecteur, qui se sent plongé au cœur de la scène.
b. Une ponctuation forte qui transmet des émotions tranchées
Le texte est développé sur un