Sur le titre des fleurs du mal
En 1848, Baudelaire décide d’un nouveau titre, plus mystérieux : Les Limbes. Dans le vocabulaire de la théologie chrétienne, les limbes sont une sorte d’espace intermédiaire, le lieu où séjournent les âmes de ceux qui n’ont pas été baptisés. Mais l’année suivante, un poète obscur s’empare justement de ce titre. Baudelaire y renonce donc et ce n’est qu’en 1855 que le titre des Fleurs du mal apparaît.
Nouveauté de ton, de sujet et surtout d’ esthétique, Baudelaire renouvelle la conception du beau en poésie en supprimant toute barrière entre sujets nobles et bas. L’esthétique baudelairienne se fonde sur le Mal, sujet poétique par excellence et critère du beau, ainsi définie dans les projets de préface aux Fleurs du mal : « Des poètes illustres s’étaient partagé depuis longtemps les provinces les plus fleuries du domaine poétique. Il m’a paru plaisant, et d’autant plus agréable que la tâche était difficile, d’extraire la beauté du Mal ». C’est l’activité poétique qui donne naissance à ces végétaux inconnus et artificiels, contre-nature.
Et ce mal, Baudelaire le découvre en lui-même. Cette introspection perpétuelle et sans complaisance, cette exploration des profondeurs de la conscience est ce qui fonde la modernité poétique de Baudelaire. La nouveauté de cette esthétique ne réside donc pas tant dans le choix du mal comme « province poétique » mais dans la découverte que ce mal gît à l’intérieur de