LE GÉNOCIDE ET SA MÉMOIRE 1. LA SPÉCIFITÉ DU GÉNOCIDE JUIF Le nombre total des victimes du génocide durant la guerre s’élève à près de 6 millions de personnes (dont environ 74 000 venant de France, et 2 042 de la Haute-Garonne), sur un total de près de cinquante millions de morts. La différence de leur sort réside dans le fait qu’il s’agit exclusivement de civils de tous âges que les nazis sont allés chercher dans le seul but de les tuer. Par son ampleur, ses conditions d’application et son caractère systématique, ce génocide est réellement sans équivalent dans l’Histoire, ce qui explique que certains auteurs refusent d’utiliser ce terme et lui préfèrent celui de Shoah afin d’en affirmer la spécificité. Pourtant, cette spécificité n’a pas été repérée immédiatement. Peu nombreux sont ceux qui dès la fin de la guerre ont compris la différence de nature et non de degré qui existe entre les camps de concentration et les centres d’extermination, entre la « déportation » (c’est-à-dire celle qui envoie dans les camps de la mort lente les « déportés de répression ») et l’extermination raciale. Et de fait, les déportés qui ont eu la chance de rentrer viennent presque tous des camps de concentration (pour le cas de la France, 60 % des déportés politiques et résistants sont rentrés, contre 3 % des juifs), et l’expérience qu’ils décrivent est celle vécue dans ce que le ministre de la Justice du Reich définissait comme des « camps d’extermination par le travail ». Jusque dans les années 1960, le camp-symbole du système concentrationnaire nazi est celui de Buchenwald.