Synthèse sur la télé-réalité
326 mots
2 pages
À l'encontre du cachot qui cache par privation de lumière, le philoso¬phe Bentham invente au XVIIIe siècle une nouvelle figure architecturale de la prison, le panopticon : à la périphérie, un bâtiment en anneau, avec ses cellules disposées sur toute l'épaisseur du bâtiment et ses fenêtres de part et d'autre qui laissent passer la lumière ; au centre, une tour, ou un surveillant peut observer tous les faits et gestes des prisonniers par l'effet du contre-jour. Dans cette organisation spatiale, ceux-ci sont constam¬ment vus, mais ils ne voient pas, ce qui en fait littéralement un dispositif de voyeurisme, si l'on suit la lettre psychanalytique. Néanmoins, ce n'est pas sur cette dimension qu'insiste Foucault. Ce qui l'intéresse plutôt, ce sont les conséquences de cette architecture sur le maintien du pouvoir. Les détenus intègrent à leur mode d'être le fait que «la visibilité est un piège1 ». Ils savent qu'ils peuvent à tout moment être vus il leur suffit de jeter un regard vers la tour centrale pour s'en souvenir, mais ils igno¬rent s'ils sont véritablement épiés, en sorte que le dispositif « assure le fonctionnement automatique du pouvoir2». Peu importe qu'il y ait un seul surveillant ou plusieurs, et qui exerce ce pouvoir, il suffit que la sur¬veillance soit intégrée comme pure virtualité par le détenu: «Un assujet¬tissement réel naît d'une relation fictive3. » En un sens, celui sur lequel s'exerce le pouvoir est le complice de son bon fonctionnement.
Or, nous dit Foucault, cette « machine à voir» ne se limite pas au milieu carcéral. En tant que modèle, elle se généralise à un moment donné à l'ensemble de la société. « Le panopticon peut être utilisé comme machine à faire des expériences, à modifier le comportement ou à redres¬ser les individus »... La seule chose que n'envisage pas le philosophe est qu'il puisse devenir un jeu!