Jacques Darriulat Introduction à la pensée de W et aux thèmes fondamentaux qui la structure. « Le premier ouvrage de Winckelmann (les Réflexions) va avoir une influence considérable et se trouve à l’origine de l’art qu’on nommera beaucoup plus tard néoclassique. A la fin du XIXe siècle, Aloïs Riegl reconnaît en Winckelmann le fondateur de l’histoire de l’art : « Ce qui fait de Winckelmann le premier historien d’art, c’est son penchant prononcé à déterminer et mettre en évidence les traits communs dont il a découvert la présence dans toutes les œuvres de l’Antiquité qu’il a étudiées. Ce qui l’intéressait, ce n’était pas l’existence singulière de l’œuvre d’art considérée pour elle-même, mais plutôt ce trait commun qui met en relation toutes les œuvres singulières, les unissant pour composer un ensemble supérieur, même si cette unité ne se réalise qu’au niveau conceptuel. » Riegl entend par là, attribuant en partie ses propres idées à Winckelmann, que cet auteur avait voulu faire une histoire non des artistes, mais des œuvres, en se basant sur la similitude des styles, proposant ainsi une datation qui ne se fondait que sur l’évolution des formes. Et c’est en effet, en partie, le projet de Winckelmann. Pourtant, la thèse fondamentale des Réflexions affirme surtout que l’art antique, ou plus exactement l’art grec, est le modèle que tous les artistes doivent imiter : « L’unique moyen pour nous de devenir grands et, si possible, inimitables, c’est d’imiter les anciens ». Or, ce n’est pas la première fois qu’on propose l’art antique pour modèle aux artistes. Depuis la Renaissance, le retour à l’antique est même le mot d’ordre qui s’impose à tous les artistes, et depuis le siècle du classicisme, s’est développée une réaction aux excès du baroque, à tel point que dans son ouvrage Idea, Panofsky parle de néoclassicisme à propos de théoriciens du XVIIe siècle, tels Gian Pietro Bellori (1636-1700), en lequel il voit le précurseur de Winckelmann. Depuis Pétrarque,