Simplicité, simplicité, simplicité! Je vous le dis, que vos affaires se réduisent à deux ou trois, et non à une centaine ou à un millier; à la place d'un million comptez une demi douzaine, et tenez vos comptes sur l'ongle d'un pouce. Au milieu de cette mer clapoteuse de la vie civilisée, les nuages, les tempêtes, les sables mouvants et les mille et un problèmes à régler sont tels qu'un homme, s'il ne veut pas sombrer ni aller par le fond sans jamais arriver à destination, doit naviguer à l'estime, et il faut vraiment être un as du calcul pour réussir. Simplifiez, simplifiez. Au lieu de trois repas par jour, n'en prenez qu'un le cas échéant; au lieu de cent plats, cinq; et réduisez tout le reste à l'avenant. Notre vie ressemble à une Confédération germanique, constituée d'États minuscules aux frontières toujours changeantes, si bien qu'à tout moment un Allemand est incapable de dire où se trouve sa frontière. Quant à la nation proprement dite, avec toutes ses prétendues améliorations internes, qui soit dit en passant sont toutes externes et superficielles, elle n'est qu'une institution pataude et boursouflée, encombrée de meubles et trébuchant sur ses propres chausse trapes, ruinée par les dépenses somptuaires et inconsidérées, par le manque de calcul et d'un objectif digne de ce nom, exactement comme les millions de foyers de ce pays; et le seul remède pour cet État comme pour eux est une stricte économie, une simplicité austère et plus que spartiate dans leur mode de vie, ainsi qu'un objectif élevé. Les hommes vivent trop vite.
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Parfois, lorsque je souffrais d'une indigestion de la société des hommes et de leurs commérages, et que j'avais usé jusqu'à la corde tous mes amis du village, je partais à l'aventure encore plus loin vers l'ouest que je n'en avais l'habitude, vers des parties de la commune encore plus écartées, « bois inconnus et nouveaux pâturages », ou bien, tandis que le soleil se couchait, je soupais d'airelles et de myrtilles sur Fair Haven