Tous les matins du monde
Dans le film d’Alain Corneau, c’est le point de vue de Marin Marais qui prend en charge tout le récit. Le roman retrace dans sa chronologie la vie de Sainte Colombe depuis la mort de sa femme, ses relations conflictuelles avec son élève et avec sa fille. Le film rapporte la confession d’un musicien célèbre qui veut révéler son imposture en racontant pendant une leçon de musique tout ce qu’il doit à son maître. Parce qu’il se présente comme un souvenir, le flash-back est teinté d’une nostalgie coupable. Le prologue ainsi ajouté est constitué d’un long plan séquence de six minutes sur le visage de Marin Marais âgé pendant qu’un maître de musique administre une leçon hors scène, suggérant ainsi la vie de la Cour au XVIIIe siècle. L’annonce d’une imposture oriente le spectateur vers un secret à découvrir, ce qui rappelle la rivalité entre Salieri et Mozart dans le film Amadeus. L’antagonisme se résout dans la confrontation finale qui s’avère être une réconciliation. Marin Marais cherchait dans l’intimité jalouse de son maître ce qu’il renfermait en lui. Dans le prologue, Marin Marais occupe différentes situations : au sentiment d’échec répond une reconnaissance. Une fois mort, le maître (l’image de Sainte Colombe revenant dans l’épilogue) peut reconnaître le talent de son disciple qui l’a égalé voire dépassé : « J’éprouve de la fierté à vous avoir instruit », finit par avouer Sainte Colombe. L’enchâssement du récit d’initiation dans une scène de leçon de musique souligne l’importance du thème de la transmission qui s’est réalisée malgré les heurts ; la leçon qu’il a