Tous les matins du monde - la quête de l'au-delà
La quête de l'au-delà
Tous les matins du monde de Pascal Quignard, rédigé en 1991, est un roman au sein duquel se dresse une dimension supérieure, celle à laquelle la musique entraine. La musique permet de retrouver ce qui est perdu, elle compense entre autre la perte de la voix et permet à l'homme d'émettre via l'instrument des notes que la nature lui a retirées. Elle permet aussi de « réveiller les morts ». Aussi, en quoi le vrai musicien se voit-il confier la mission, comme Orphée, de faire revivre l'inanimé ? Le musicien défie la mort, non par l'épée, mais par le son, magique, à même de la faire plier, comme Orphée le fit face à Cerbère et les Euménides. Seulement, ce défi a ses limites : seuls des souvenirs, des ombres, reviennent en surface, mais la résurrection n'est pas complète, la musique montre alors ses limites. I] Le défi de la morta) La mort, seul ennemiSi la musique veut « réveiller les morts » (p. 115), elle se doit de défier le trépas. Comme dans la mythologie grecque, défier la mort suppose la descente aux Enfers, comme le fit Ulysse dans l'Odyssée, comme le firent aussi Enée et Orphée. Cette descente aux Enfers est une transgression nécessitant le franchissement du célèbre fleuve, l'Achéron, sur la « Barque de Charon ». D'ailleurs, ce nom est aussi celui d'une des compositions de Sainte Colombe : « [Madeleine] lui avoua que sont père avait composé les airs les plus beaux qui fussent au monde [...]. Il y avait la Barque de Charon » (p. 81). Le musicien n'affronte pas la mort à l'épée. D'ailleurs, lorsque Marais surprend son maitre l'épée au flanc, il « tenait les yeux fixés sur l'estocade signée », étonné, alors que Sainte Colombe n'est en rien fidèle aux activités traditionnelles de l'aristocratie que sont la chasse et les armes. En effet, le janséniste, dont la mort est le seul ennemi, préfère l'archet à l'épée. b) L'Odyssée de Sainte ColombeCette odyssée intérieure qu'il mène commence dès l'incipit du