Tous les matins du monde
La beauté suave de Madeleine attise le désir sexuel de Marais lorsqu'il entraperçoit la jeune femme nue en quittant la demeure des Sainte Colombe. La fusion amoureuse est rapide, presque brutale. L'initiation à la sexualité se fait après un épisode clé de l'œuvre qu'est la rupture entre Sainte Colombe et Marais, après que ce dernier a joué devant le roi à la chapelle. Seulement, Madeleine place en son père une confiance certaine : « non » répond-elle à la remarque de Marais assurant que « [son] père est un homme méchant et fou ». Madeleine se fait l'intermédiaire. De fait, c'est elle qui promet à Marais, cet enfant « rouge comme la crête d'un vieux coq », de lui dispenser secrètement l'enseignement de la viole. Madeleine est dépendante du jeune homme, d'une part du fait de ses sentiments, d'autre part sexuellement. L'ambition prononcée de Marais est pourtant annonciatrice de son infidélité future puisque Madeleine est une femme secrète, en retrait, vouée au silence. Justement, la nomination de Marais en tant que « musicqueur du roi » correspond à son désintérêt sexuel envers celle qui l'initia à l'amour et à l'art, nonobstant des visites clandestines dans des chambres à « Versailles » et même à la demeure familiale (p. 81-82) : « Madeleine le rejoignait à Versailles ou à Vauboyen où ils s'aimaient dans une chambre d'auberge. » Ce désintérêt se fait au profit d'abord de Toinette telle une parenthèse, puis ensuite de Catherine d'Amicourt.
Ainsi, discrète mais passionnée, Madeleine vit paisiblement, presque naïvement, alors que se profilent une succession d'évènements qui lui sont fatals. Les prémices de sa tragédie lui sont pourtant