Toute vérité est elle relative ?
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"Il s'avère qu'en cette année de sinistre mémoire [1937], Andreï Ianouarévitch […] Vychinski [1] fit un exposé devenu célèbre dans les cercles spécialisés : dans l'esprit de la dialectique la plus souple (que nous ne permettons ni aux sujets de l'État, ni maintenant aux machines électroniques, car pour celles-ci un oui est un oui, un non est un non), il rappela qu'en ce qui concernait les hommes, il n'était jamais possible d'établir de vérité absolue, mais seulement relative. À partir de là, il fit un pas que, depuis deux mille ans, les juristes n'avaient jamais osé franchir : il déclara qu'en conséquence, la vérité établie par l'instruction et le tribunal ne pouvait être absolue, elle non plus, mais seulement relative. C'est pourquoi, en signant une condamnation à mort, jamais nous ne pouvons de toute façon être absolument sûrs de punir un coupable, mais seulement dans les limites d'une certaine approximation, en émettant certaines suppositions, en un certain sens. Concrètement, il s'ensuit que c'est une pure et simple perte de temps que la recherche de pièces à conviction absolues (elles sont toutes relatives) et de témoins irréfutables (ils peuvent se contredire). Quant à trouver des preuves relatives, approximatives de la culpabilité, cela, le commissaire instructeur peut fort bien y arriver sans pièces à conviction et sans témoins, sans sortir de son bureau, « en s'appuyant non seulement sur sa propre intelligence, mais aussi sur son flair de membre du parti, sur ses forces morales » (c'est-à-dire sur la supériorité de celui qui a bien dormi, bien mangé et qui n'a pas reçu de coups) « et sur son caractère » (c'est-à-dire sa volonté d'exercer sa cruauté) ! […] C'est ainsi que de déduction en déduction, suivant un développement en spirale, notre science juridique d'avant-garde en est revenue à des conceptions pré-antiques et médiévales. À l'instar des exécuteurs des hautes œuvres du Moyen-Âge, nos commissaires instructeurs, nos procureurs et nos juges