Tput peut il s'acheter ?
«Tout s'achète » : telle est l'évidence sur laquelle repose la société marchande. Tout, qu'il s'agisse de biens ou de services, pourrait s'acheter, pour peu qu'on consente à y mettre le prix. Or le principe de l'achat et de la vente est celui de l'équivalence entre les choses échangées. On entre dans la société marchande lorsque, du fait de la division du travail, chaque homme ne peut subsister que par un système d'échanges, et devient ainsi, de fait, une sorte de commerçant. Or l'échange n'a de sens économique que si l'on échange des choses dissemblables et hétérogènes les unes aux autres. Pourtant, le principe de l’échange suppose en même temps que ces choses soient en quelque manière équivalentes, ou du moins qu'il soit possible de les rendre commensurables en les rapportant à un étalon commun. De la valeur d'usage de l'objet, par où les biens sont hétérogènes les uns aux autres, il faut donc distinguer la valeur d'échange. Par exemple si la valeur d'usage d'une paire de bottes renvoie au fait qu'on puisse les porter, marcher avec, et mesure le temps pendant lequel je pourrai les porter, leur résistance, etc., sa valeur d'échange renvoie à ce contre quoi je pourrais les échanger (telle quantité de nourriture par exemple). L’argent n'est que la matérialisation de cette valeur d'échange, et permet de rapporter tout bien ou tout service, quel que soit son usage par ailleurs, à un étalon commun permettant de rendre commensurable ce qui est par nature hétérogène.
Tout pourra donc s'acheter si tout est susceptible d'être rapporté à un étalon commun, à une unité de mesure. Or telle est précisément la vocation de l’argent : l'argent est un commutateur ou un médiateur universel entre toutes les choses en circulation dans la société, susceptibles d'être échangées. Le principe de la société marchande est donc qu'il est possible pour toute chose de fixer un prix, ou plutôt que c'est le marché lui-même qui fixe le