Tristan et iseut
« Belle sœur, pourquoi riez-vous ?
— Pour un penser qui me vint, beau frère. Quand cette eau a jailli vers moi, je lui ai dit : « Eau, tu es plus hardie que ne fut jamais le hardi Tristan ! » C’est de quoi j’ai ri. Mais déjà j’ai trop parlé, frère, et m’en repens. »
Kaherdin, étonné, la pressa si vivement qu’elle lui dit enfin la vérité de ses noces. Alors Tristan les rejoignit, et tous trois chevauchèrent en silence jusqu’à la maison de chasse. Là, Kaherdin appela Tristan à parlement et lui dit :
« Sire Tristan, ma sœur m’a avoué la vérité de ses noces. Je vous tenais à pair et à compagnon. Mais vous avez faussé votre foi et honni ma parenté. Désormais, si vous ne me faites droit, sachez que je vous défie. »
Tristan lui répondit :
« Oui, je suis venu parmi vous pour votre malheur. Mais apprends ma misère, beau doux ami, frère et compagnon, et peut-être ton cœur s’apaisera. Sache que j’ai une autre Iseut, plus belle que toutes les femmes, qui a souffert et qui souffre encore pour moi maintes peines. Certes, ta sœur m’aime et m’honore ; mais, pour l’amour de moi, l’autre Iseut traite à plus d’honneur encore que ta sœur ne me traite un chien que je lui ai donné. Viens ; quittons cette chasse, suis-moi où je te mènerai ; je te dirai la misère de ma vie. »
Tristan tourna bride et brocha son