Un homme sans passé peut-il être libre ?
Introduction
On peut opposer l’idée du passé comme poids et déterminisme à l’idée de liberté comme absence de contrainte : pour être libre, il faudrait ne pas avoir de passé. Mais la liberté peut être conçue autrement : comme autonomie, pouvoir de décider et d’agir par soi-même avec raison, ce qui exige connaissance et maîtrise de soi. Le passé ici semble nécessaire : mon passé me caractérise et donne sens à mon histoire individuelle, il est moi. D’où la question posée par le sujet : peut-on vraiment penser qu’un homme sans passé puisse être libre ? Sa liberté ne se révélerait-elle pas illusoire ? Mais alors le problème se pose de savoir comment le passé peut être source de liberté si par ailleurs il peut se révéler contraignant : s’agit-il simplement de l’accepter et de le continuer, ou peut-on envisager une certaine forme d’action sur le passé ?
I. Le passé comme contrainte niant la liberté : il faut ne pas avoir de passé pour être libre
1. Le passe comme temps révolu engendre le regret nostalgique qui s’oppose à la liberté d’action
Le passé peut être conçu comme ce qui malheureusement n’est plus, et que le temps a laissé derrière en passant : « tu ne baigneras jamais deux fois dans le même fleuve ». La phrase d’Héraclite prend le sens d’un regret nostalgique : tout se perd en devenant, y compris nous-mêmes. Ainsi le passé peut engendrer le manque, désir de retrouver un temps qui n’est plus. La passivité du désir nous empêche d’être actifs. Or la liberté est bien le pouvoir d’agir sans que rien ne vienne entraver l’action. Le passé prend ici la figure de l’obstacle, de la contrainte. Pour être libre il faudrait alors que je ne pense plus à ce que je fus pour me tourner vers l’avenir, il faudrait oublier.
2. Le passé comme acte accompli dans la faute m’impose le remords qui obsède mes pensées
Plus encore, le passé peut prendre le sens d’un poids culpabilisant :