Une anthologie poétique
Un homme, dans le cours de sa vie, joue différents rôles ; et les actes de la pièce sont les sept âges. Dans le premier, c'est l'enfant, vagissant, bavant dans les bras de sa nourrice. Ensuite l'écolier, toujours en pleurs, avec son frais visage du matin et son petit sac, rampe, comme le limaçon, à contre-coeur jusqu'à l'école. Puis vient l'amoureux, qui soupire comme une fournaise et chante une ballade plaintive qu'il a adressée au sourcil de sa maîtresse. Puis le soldat, prodigue de jurements étranges et barbu comme le léopard. Chaque profession avait jadis une forme de barbe particulière. La barbe du juge différait de celle du soldat,jaloux sur le point d'honneur, emporté, toujours prêt à se quereller, cherchant la renommée, cette bulle de savon, jusque dans la bouche du canon. Après lui, c'est le juge au ventre arrondi, garni d'un bon chapon, l'œil sévère, la barbe taillée d'une forme grave ; il abonde en vieilles sentences, en maximes vulgaires ; et c'est ainsi qu'il joue son rôle. Le sixième âge offre un maigre Pantalon. en pantoufles, avec des lunettes sur le nez et une poche de côté : les bas bien conservés de sa jeunesse se trouvent maintenant beaucoup trop vastes pour sa jambe ratatinée ; sa voix, jadis forte et mâle, revient au fausset de l'enfance, et ne fait plus que siffler d'un ton aigre et grêle.Enfin le septième et dernier âge vient unir cette histoire pleine d'étranges événements ; c'est la seconde enfance, état d'oubli profond où l'homme se trouve sans dents, sans yeux, sans goût, sans rien.
SHAKESPEARE, Comme il vous plaira 1599. Un drame romantique.
Je vous envoie un bouquet, que ma mainVient de trier de ces fleurs épanouies,Qui ne les eut à ces vêpres cueillies,Tombées à terre elles fussent demain.
Cela vous soit un exemple certain,Que vos beautés, bien qu'elles soient fleuries,En peu de temps, seront toutes