Une partie de campagne
M. Dufour, ayant empruntÈ la voiture du laitier, conduisait lui-mÍme. La carriole, ‡ deux roues, Ètait fort propre; elle avait un toit supportÈ par quatre montants de fer o ̆ s'attachaient des rideaux qu'on avait relevÈs pour voir le paysage. Celui de derriËre, seul, flottait au vent, comme un drapeau. La femme, ‡ cÙtÈ de son Èpoux, s'Èpanouissait dans une robe de soie cerise extraordinaire. Ensuite, sur deux chaises, se tenaient une vieille grand- mËre et une jeune fille. On apercevait encore la chevelure jaune d'un garÁon qui, faute de siËge, s'Ètait Ètendu tout au fond, et dont la tÍte seule apparaissait.
AprËs avoir suivi l'avenue des Champs-...lysÈes et franchi les fortifications ‡ la porte Maillot, on s'Ètait mis ‡ regarder la contrÈe.
En arrivant au pont de Neuilly, M. Dufour avait dit: "Voici la campagne enfin!" et sa femme, ‡ ce signal, s'Ètait attendrie sur la nature.
Au rond-point de Courbevoie, une admiration les avait saisis devant l'Èloignement des horizons. A droite, l‡-bas, c'Ètait Argenteuil, dont le clocher se dressait; au-dessus apparaissaient les buttes de Sannois et le Moulind'Orgemont. A gauche, l'aqueduc de Marly se dessinait sur le ciel clair du matin, et l'on apercevait aussi, de loin, la terrasse de Saint-Germain; tandis qu'en face, au bout d'une chaÓne de collines, des terres remuÈes indiquaient le nouveau fort de Cormeilles. Tout au fond, dans un reculement formidable, par-dessus des plaines et des villages, on entrevoyait une sombre verdure de forÍts.
Le soleil commenÁait ‡ br ̊ler les visages; la poussiËre emplissait les yeux continuellement, et, des deux cÙtÈs de la route, se dÈveloppait une campagne interminablement nue, sale et puante. On e ̊t dit qu'une lËpre l'avait ravagÈe, qui rongeait