Urbanisation africaine
Si l'explosion démographique constitue un des facteurs fondamentaux des dynamiques contemporaines de l'Afrique noire, il est un domaine où les mutations sont encore plus extraordinaires : celui de l'urbanisation. Longtemps considérée comme essentiellement rurale, et longtemps étudiée comme telle, l'Afrique s'urbanise sur un tempo exceptionnellement rapide. À aucun moment dans l'histoire de l'humanité des taux de croissance urbaine aussi élevés n'ont été observés à l'échelle d'un continent et sur une aussi longue durée. Les bouleversements économiques, sociaux, culturels et politiques engendrés par cette croissance sont si profonds qu'on peut sans hésiter parler de révolution urbaine. Naturellement cette révolution, trop rapide, trop brutale, inquiète. Lagos, plus vaste agglomération d'Afrique noire dont on ne sait au juste si elle rassemble 6, 8 ou même 10 millions d'habitants, ou Kinshasa, vibrant écho de l'histoire chaotique du Congo, font peur par leur gigantisme. Tout comme Johannesburg et ses townships frappés du sceau de la violence. Les grandes villes en général sont perçues comme des espaces ingérables et dangereux, criminogènes, reléguant des masses d'exclus vers d'impénétrables bidonvilles. Certaines sont devenues en outre le théâtre d'affrontements violents, voire de véritables guerres civiles, entre factions politiques. Aujourd'hui on peut craindre, non sans raisons, que la liste des capitales de la douleur ne soit pas close : Mogadiscio, Freetown, Brazzaville...
Grandies trop vite, et souvent déconnectées de l'économie réelle, les villes d'Afrique sont confrontées à d'incommensurables problèmes d'aménagement de l'espace, d'équipement, d'emploi. Plus que des « pôles de croissance », au sens donné à ce concept par l'économiste François Perroux, elles sont des pôles de consommation, mais avec la crise l'offre parvient difficilement à satisfaire la demande. Ce serait toutefois une vision fausse et très réductrice que de voir ce